Poèmes à lire.... à illustrer...
Ces quelques textes ont été écrits dans les années soixante-dix. Certains d'entre eux seront accompagnés d'une image textile (plusieurs en cours) , d'autres figurent pour l'éventuel plaisir de la lecture.
Si d'aventure vous êtes tentés vous aussi de les illustrer, par quelque moyen à votre convenance,n'hésitez-pas, je serai heureuse de voir votre interprétation.
ANALOGIE
Les paradis perdus
Sous la lune qui saigne
D’un excès de lumière
Les pas des amants affolés par la fièvre
Ressemblent au jeu divin
Au jeu des jours qui souffrent
Pour retomber mourants
Sous les coups du soleil
Qui les perce en fuyant
Les paradis trouvés
Les amants rassasiés
Ressemblent au jeu cruel
Du temps qui s'amoncelle
Pour ne laisser rien.
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Sur la terre, il croyait aimer
Mais il ne savait pas partir
Et dans le cœur des souvenirs
Il n’y a plus rien de nouveau
Sur la terre il croyait savoir
Peut-être savait-il vraiment
Mais il n’aimait pas oublier
Et dans la mer des sentiments
Il s’est noyé sans dire mot.
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Elle
Il y avait des jours des mots
Et puis des songes
Des rires de marmots
Et puis de pieux mensonges
Elle courait toute droite
Sur des toits décharnés
Elle courait sans cesser
D’aimer se retourner
Dans chaque petit trou
Où elle faillit tomber
On percevait
Des chants des cris
Et des silences
Des heures de volupté
Et puis d’indifférence
Entre les quatre murs
Où elle se débattait
Je la buvais ma vie
Sans l’avoir méritée
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Un mélange de miel et d’exil
De fiel fragile et de regrets
Et mille fois je crie, je crée
Mes désirs sont des ombres
Inexaucés
Paradis recouverts de mémoire
Le sens des mots éclaire le visage des lampes
Les fenêtres ont tissé l’appel
Au coin de tes lèvres
Sourire à demi tiré
Souffle oublié
Elle saura te dire mes rires et mes navires
Et elle te bercera sur des rythmes oubliés
Et le soleil de mes mers mortes
Tes yeux y seront voilés
Réveillés
Par l’âpre distance des choses
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LA MUSE PRODIGUE
Elle a connu, je crois son déluge inconscient
Et gaspillé sa part de vent
Elle a laissé tomber ses larmes en pluie
Plus encore en tempête
Elle a dénoué ses cheveux
Quand elle a eu trop froid
Pour ne plus y penser
Et pour un moment elle s’est tue
Parce que sa voix était vaincue
Elle a repris son cours pour pousser ses navires
Recommencé ses cris et ses délires gratuits
Les mains agenouillées
Sous son menton pointu, inquiet.
Réitérant sa fuite, voyageuse immobile,
Fixée inexorablement
A un but sans merci
Cernant trop ses désirs
Pour y trouver sa paix
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Préciosité
Aux jardins de l’amour
Les branches vénéneuses
Ont piqué à mes pieds
Les fleurs de la raison
Si je ne fus jamais
Languide et amoureuse
C’est que mon cœur jamais
Ne bat de sa passion
Les routes de l’amour
Ont des charmes pour guides
Et à suivre leurs pas
Je sais me fourvoyer
Mais le faux- brillant jour
M’a toujours ramenée
Jusqu’à une maison
Où je peux m’isoler
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Mélodieusement, mon printemps à moi se moque du vôtre,
Et pourtant le vôtre et le mien ont les mêmes mains et la même saveur.
Quand je cours, c’est toujours vers vous même si vous êtes très loin.
Harmonieusement les senteurs de ma terre s’échappent
Et de vous et de moi
La vie nous submerge, parce que nous ne savons pas…
Quand je prends mon élan c’est vers vous, même si vous n’êtes pas là.
Mon adieu je vous l’ai dit au départ
Et vos printemps respireront l’hiver des miens
L’ivre hiver dans son austère sérénité
Et sa glaciale plénitude.
Livre ouvert sur nos solitudes.
Plaines.
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La pierre sur la pierre
Barrière invisible
Mais ardente insurmontable
Et fanées les roses de toi et de moi
Sur ce grand lit vide
Où nos amours seront défaites
Patience et raison s’agrippent aux murs
Fixes tableaux de l’inanité de vivre
Le mur s’étend jusqu’aux cieux brûlés
De mes amours passées
Course éperdue des nuits
Où je cherche refuge contre toi
Mur hostile et bienfaisant
Grand silence serein obscur
Créateur d’une tendresse
Qui, puisée de mon cœur
Ne se tend vers personne.
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Facétie
A voir printemps
A voir automne
A voir hiver
Avoir été.
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Seule, tes yeux pour moi
Me déchirent le monde
Et d’un trait de cristal
Raient sa banalité
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Adieu le jeu de mes nuits et des jours
Adieu le chant où s’infusait l’amour
Je distillais l’eau de ma vie mauvaise
Et dans l’absence si un cri seul apaise
Je laisse mes Bacchantes
A leur chaste séjour.
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Debout, ne pas lutter la victoire trop facile
Et laisser s’écrouler sur la ligne de vie
Les chants désespérés de n’être point inscrits
Sur le registre ardent des feuilles de folie.
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Moi , la terre
Autour se creuse le silence. Les cheveux de son rêve glissent sur la page du livre de pierre
La dune élève un chant austère à deux pas du ruisseau des mortes vertus.
Le cœur brisé, gisant dans son âme trop fière.
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Il fallait qu’elle reste à demeure
Et rien qu’à y penser
Elle se sentait pousser des giroflées au cœur
Il lui avait dit
Tu restes la gardienne de mon retour
Tu restes au sein de ta passion, et tu couves les cendres de la mienne
Mais le grand alizé des saisons descendantes avait ravi les tiges mortes de leurs dernières moissons
Ensemble, ils allaient près de la fontaine, et le bruit de l’eau hébergeait les sourires dont ils se souviendraient trop tard
Elle restait la prometteuse, seule détentrice de la fertilité du souvenir et c’était faussement facile
La souffrance l’avait laissée pour sauve un matin
De ce salut imbécile qu’on nomme oubli et elle en vint à souhaiter sa rechute
Elle était la tour de ses sentiments leur défense et leur garde
Et elle jouissait de savoir son exil éternel
Depuis cette terre où je suis trop née
Et ce bannissement qui fait germer en moi la noblesse souveraine
Celle de se sentir semblable et solidaire au sein de l’essentielle différence
Celle de se sentir aussi inlassable que la sempiternelle indifférence
Dont il m’a rendue maître et servante
Et je resterai à la fois la grappe et la vendange
Gardant pour lui la gemme d’un vin nouveau et corruptible.
L’enclos d’une prison tendre où cet été incongru de mai m’enfermait passive
La joie perfide de l’écriture retrouvée, l’étrange docilité des mots après les jours d’inanition
La frange obscure du jour au bord de la fenêtre
La fécondité paisible de la nuit où j’organise le silence
Cette fluidité exquise des contours du rêve inachevé
L’harmonieuse absence de ma vitalité criarde et débordante
J’avais pour don.
J’avais pour ton amour la trahison du monde
Le vase s’est refermé en toi.
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Je porte le poids dévoilant
Des révoltes
Mensonge, les mots demi masqués
Les mains demi tendues
Je dis , et mes paroles égalent le silence.
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